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Dans le domaine du management, il a été établi que les équipes les plus performantes sont celles dans lesquelles les managers font 5 fois plus de commentaires positifs que de commentaires négatifs. Dans la recherche sur le couple et sur les prédicteurs du divorce, il a également été trouvé que les couples les plus stables se faisait environ 5 fois plus de commentaires positifs que de commentaires négatifs. Dans le domaine de la parentalité, il a été montré que les enfants qui reçoivent 5
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à 6 commentaires positifs pour un négatif sont ceux qui progressent le plus en vocabulaire et en intelligence. De manière plus générale, l'idée qui se dégage de ces recherches est que l'effet d'un reproche, d'une critique ou d'une sanction est tellement délétère sur le ressenti et la motivation de l'individu, que 5 compliments ou récompenses sont nécessaires pour le compenser. Et alors, qu'en est-il dans les classes ?
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Hé bien, les mêmes observations ont été reproduites: plus les compliments sur les comportements appropriés sont nombreux, plus les comportements perturbateurs et les périodes d'inattention diminuent, et plus les élèves sont concentrés sur leur travail. Les études dans le domaine de l'éducation ont mis en évidence que des rapports compliments/réprimandes allant de 3 compliments pour 1 réprimande à 5 pour 1 semblent avoir un effet positif. Pour prendre un exemple, dans une étude
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récente, les chercheurs ont mesuré dans un grand nombre de classes à la fois le nombre de compliments et de réprimandes donnés par les enseignants, et le fait que les élèves étaient occupés à leur travail ou à autre chose. Comme le montre le graphique, il y a une claire corrélation entre les 2. Le rapport entre les compliments et les réprimandes est sur l'axe des x: plus il augmente, plus les élèves sont concentrés sur leur travail, et ça,
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c'est représenté sur l'axe des y, la concentration des élèves. On pourrait bien sûr se demander quel est le sens de la causalité: est-ce que ce n'est pas plutôt parce que les élèves sont plus concentrés que les enseignants leur font plus de compliments que de réprimandes ? Sans doute que ça joue. C'est une question très importante à se poser. La meilleure manière d'y répondre est d'effectuer une expérimentation, c'est ce qui a été fait dans cette étude. En fait, la moitié des enseignants ont été tirés au
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sort pour suivre une formation qui les encourageait notamment à augmenter le rapport entre le nombre de compliments et de réprimandes qu'ils donnaient. Ces enseignants sont représentés sur le graphique par les cercles, alors que ceux qui n'ont pas suivi la formation sont représentés par les points. Et comme vous le voyez, ceux qui n'ont pas suivi la formation, les points, ils donnent généralement moins de un compliment pour une réprimande,
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alors que ceux qui l'ont suivi, les cercles, donnent en moyenne 3 compliments pour une réprimande. Autrement dit, ils appliquent bien ce qu'ils ont appris dans leur formation. Et comme vous le voyez, les cercles sont globalement au-dessus des points sur l'axe des y. Autrement dit, leurs élèves sont plus concentrés sur leur tâche que ceux des enseignants qui n'ont pas suivi la formation. Cette expérience permet donc de répondre à l'interrogation sur le
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sens de la causalité. C'est bien lorsque le rapport compliments/réprimandes augmente que la concentration des élèves augmente, et pas juste le contraire. Bien sûr, il ne s'agit pas de dire qu'il faudrait totalement éliminer les réprimandes et les interactions négatives. Elles sont absolument nécessaires dans la mesure où les élèves ont aussi besoin d'information sur leurs faibles performances ou sur leurs comportements inacceptables pour pouvoir s'améliorer.
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Néanmoins, les commentaires négatifs ne produisent les effets désirés que dans un contexte qui est globalement positif, rassurant, motivant, et dans lequel la bonne performance et les bons comportements sont eux aussi reconnus à leur juste valeur et récompensés. Plus généralement, augmenter le rapport compliments/réprimandes est un bon moyen de cultiver des relations plus positives avec ses élèves et d'améliorer le climat de classe.
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Bien sûr, il s'agit pas non plus de dire que ce rapport de 5 pour 1 est magique, ou est une règle absolue scientifiquement prouvé. D'ailleurs, le graphique ne montre aucun effet de seuil. Simplement un rapport de 3 pour 1 ou de 5 pour 1 est à prendre comme une référence indicative à laquelle vous pourrez comparer les pratiques actuellement mises en œuvre dans les classes. Le fait est que la discipline a l'école est essentiellement régulée par des punitions et des menaces
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de punitions, les règlements intérieurs des établissements sont révélateurs à ce sujet. Pourtant, les punitions ont des effets pervers bien connu. Premièrement, elles sont sources de souffrances immédiates. Évidemment, il ne s'agit plus de souffrance physique. Heureusement, en France, il n'y a plus de châtiments corporels, mais il s'agit tout de même de souffrance psychologique qui se traduit chez les élèves par des émotions négatives comme la tristesse, la colère. Et ça peut se manifester par des pleurs,
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des tremblements, des rougissements et des comportements inadaptés. Deuxièmement, la simple menace de punition est une source d'émotions négatives: la peur, l'anxiété, le stress. Alors bien sûr, vous le savez déjà que les punitions provoquent de la détresse chez les élèves, mais quand même, il est pas inutile de le rappeler et de bien en prendre conscience. Après tout, aucun enseignant ne veut faire souffrir ses élèves, et pourtant, tous le font à des degrés divers.
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Par ailleurs, on sait que les émotions négatives ont une influence néfaste sur les apprentissages. On en reparlera dans le chapitre sur la motivation. Plus généralement, dans l'idéal, l'école devrait être un lieu d'épanouissement et d'émotions positives pour tous les élèves. Malheureusement, ce n'est pas facile à atteindre et on n'en est pas tout à fait là. Alors bien sûr, les émotions négatives ne peuvent pas toujours être évitées pour tous les élèves, mais quand même, tous les efforts devraient être faits pour
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les minimiser. 3e point, à cause des émotions négatives, les punitions engendrent des comportements indésirables, des réactions d'évitement, par exemple, le fait de sécher les cours; ou d'échappement, par exemple, le fait de simuler une maladie ou de provoquer un incident pour éviter d'être puni si on a oublié de faire ses devoirs ou de réviser pour le contrôle; et même des comportements d'agression. Quatrièmement, lorsque des punitions sont reçues de manière répétée,
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la personne qui inflige les punitions, l'enseignant, et le contexte global, la classe ou l'école, deviennent associés dans l'esprit de l'enfant aux émotions négatives ressenties. L'enseignant et l'école deviennent petit à petit des stimuli aversifs, des antécédents qui déclenchent des émotions négatives même en l'absence de punition. Autrement dit, les élèves qui sont punis souvent, acquièrent une aversion, ils apprennent à ne pas aimer
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l'enseignant qui les punit et ils en finissent par ne pas aimer tout le contexte de ces punitions répétées. Donc, ils apprennent à ne pas aimer l'école. Enfin, lorsque des punitions sont reçues de manière répétée, elles perdent de leur effet. C'est le phénomène d'habituation ou de désensibilisation. Tous les enseignants le savent, chez les élèves réputés difficiles, la crainte des punitions n'a rapidement plus d'effet.
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Ensuite, à mesure que les punitions perdent leur effet et que les comportements inadaptés perdurent, voire s'aggravent, les enseignants et l'institution répondent par une escalade dans l'échelle des sanctions. Cette escalade est généralement sans effet sur le comportement, mais elle engendre un ressentiment et un rejet toujours plus fort chez l'élève et cette escalade des sanctions culmine dans les mesures d'exclusion qui n'apportent de solution ni à l'élève
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qui est déscolarisé et libéré de tout encadrement, ni à l'institution, en tout cas pendant la durée de la scolarité obligatoire. Les exclusions sont de simples aveux d'échec du régime des punitions. On voit donc que les punitions ont de nombreux effets indésirables. Si encore, elles étaient efficaces ! Le problème, c'est qu'elles ne le sont pas. 60 ans de recherches sur le comportement montrent que si on a pour objectif de diminuer durablement les comportements indésirables,
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les punitions sont en fait peu efficaces. Et pourtant, nous avons tous l'illusion que les punitions sont efficaces. Pourquoi ? C'est parce qu'elles sont efficaces à court terme. Une punition a souvent un effet immédiat. Si on crie en direction d'un enfant, il y a des chances que ça interrompe son comportement à court terme. Donc le problème c'est à moyen et à long terme. L'effet sur la probabilité que le comportement réapparaisse est à
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peu près nul. Alors pourquoi? Il y a tout un ensemble de raisons. L'une d'entre elles, c'est une erreur d'attribution, c'est à dire un type de biais cognitif bien connu: Les élèves qui sont punis ont tendance à attribuer la cause des punitions à l'enseignant - par exemple, ils se disent, "il peut pas me supporter" - plutôt qu'à leur propre comportement. Du coup, d'une part ils ne corrigent pas leur comportement, et deuxièmement ils acquièrent une aversion pour l'enseignant.
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Deuxièmement, lorsque des punitions sont reçues de manière répétée, l'élève se désensibilise petit à petit de leurs effets. Les punitions perdent leur effet dissuasif. Et Troisièmement, les adolescents en particulier apprennent peu des punitions. En effet, il a été montré expérimentalement que lorsque les adultes apprennent autant des punitions que des récompenses, les adolescents, eux, apprennent moins des punitions que des récompenses.
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C'est une particularité dont il faut tenir compte. Ensuite, certaines punitions renforcent des associations qui sont contre-productives. Par exemple les heures de colle et toute punition qui s'effectue sur un temps supplémentaire au sein de l'établissement créent une association négative, c'est-à-dire aversive chez l'élève. Dans son esprit, l'établissement est équivalent à la punition. Ça va à l'encontre de l'association positive que l'on doit
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s'efforcer de créer. Enfin, peut être le point le plus important et qui fournit une clé importante d'intervention, c'est que punir un comportement informe l'élève que le comportement est indésirable, mais ça ne le remplace pas par le comportement désiré. Si l'enfant n'a pas le comportement désiré dans son répertoire, ou si ce comportement n'offre pour lui aucune gratification, alors il n'émergera pas tout seul.
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Autrement dit, on ne peut pas juste supprimer des comportements indésirables. Il faut penser à les remplacer par d'autres comportements plus adaptés. En résumé, les punitions ont une faible efficacité et elles ont de nombreux effets indésirables. Alors il s'agit pas de dire qu'il faut s'interdire toute punition. Ce n'est probablement pas possible. Les punitions bien choisies et bien dosées peuvent faire partie
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d'un programme de régulation du comportement bien conçu. Mais elles n'en sont jamais l'ingrédient principal et elles doivent être utilisées avec retenue et selon des modalités bien particulières pour être efficaces, sans être contre-productives, il faut donc s'efforcer de minimiser l'usage des punitions et éviter à tout prix de rentrer dans le cercle vicieux des interactions négatives et dans l'escalade des punitions, quel que soit l'élève.
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Alors ne faudrait-il pas repenser le rôle des récompenses et des punitions ? Oui, en fait, il est possible de faire disparaître les comportements indésirables en ayant recours principalement à des récompenses et donc en évitant les effets pervers des punitions et en maintenant une bonne relation avec l'élève. L'idée de génie est la suivante: plutôt que de punir les comportements indésirables en espérant les faire disparaître, il faut les remplacer par d'autres comportements plus adaptés.
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Et pour cela, il faut enseigner et récompenser ces comportements adaptés. Il s'agit d'un renversement de perspective fondamental par rapport à notre attitude spontanée, car nous sommes tous victimes d'un biais de négativité, c'est à dire que notre attention est plus fortement et spontanément attirée par les événements négatifs que par les événements positifs. Vous savez, on remarque toujours les trains qui arrivent en retard,
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mais on ne parle jamais de ceux qui arrivent à l'heure. Lorsqu'un comportement inadapté survient en classe, notre attention est naturellement focalisée sur ce comportement. Et s'il se répète, ce comportement peut devenir une obsession. Nous n'arrivons pas à penser spontanément à une solution au problème autrement qu'en se focalisant sur ce comportement. La clé réside donc dans le fait de contrarier cette habitude de pensée pour se focaliser sur les comportements souhaités.
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La première étape consiste donc à identifier le ou les comportements désirés qui sont amenés à remplacer le comportement indésirable. D'une certaine manière, il s'agit d'identifier des comportements opposés aux comportements indésirables. On appelle cela des opposés positifs. Une fois ces comportements identifiés, il est possible d'augmenter progressivement leur probabilité en jouant à
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la fois sur les antécédents et sur les conséquences. Nous allons détailler cette approche dans les vidéos suivantes.
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