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quand on veut on peut c'est une idée extrêmement répandue dans la culture les médias ou la politique la France est et doit être un pays méritocratique un pays où l'on réussit par la force de son
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mérite c'est toute la République le mérite la République c'est quoi c'est l'histoire du petit garçon qui n'a rien et qui peut devenir un président de la République le mérite c'est la chose la plus importante qui soit est-ce que ça
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ça peut être une piste aujourd'hui en France de payer les fonctionnaires au mérite moi je suis tout à fait favorable moi je pense qu'il faut accroîre la part en effet de mérite la part d'évaluation dans la rémunération de la fonction publique c'est une façon de le
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moderniser la méritocratie telle qu'on la conçoit est très importante à analyser car elle soutend une grande partie du débat politique et médiatique c'est bien parce que bon nombre de gens pensent qu'il y a une certaine justice
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en France que si l'on possède quelque chose c'est parce qu'on le mérite qu'autant de personnes déploreent dans les médias un soi-disant problème avec la réussite notamment avec les très riches et oui selon eux s'ils sont
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fortunés s'ils ont une grosse carrière c'est qu'ils l'ont mérité alors quand ils sont critiqués ils prennent ça pour de la jalousie moi je trouve que il y a un problème dans dans notre pays c'est
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c'est que on n'aime pas la réussite et le succès donc vous trouvez que les Français ont un problème avec ça avec la réussite ou avec l'argent avec la jalousie avec la jalousie vous vous dites quoi paril la
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jalousie vous êes d'accord saz en France dès que quelque chose i il y a des critiques dans tous les sens cet argument régulièrement avancé
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par les plus privilégiés le quand on veut on peut sert surtout à légitimer l'existence du système en place c'est pour cette raison que je voulais terminer l'année avec cette vidéo un peu spéciale mon philosophie économie et
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politique la méritocratie existe-t-elle vraiment en d'autres termes partons-nous réellement avec les mêmes chances dans la vie l'effort est-il récompensé socialement et économiquement en France
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est-il même souhaitable que le talent et le travail soi récompensé ne faudrait-il pas remplacer la dage quand on veut on peut par quand on peut on veut c'est à toutes ces questions qu'on va essayer de répondre dans cette nouvelle émission
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pour [Musique] blast commençons par définir le mot méritocratie qui va être au cœur de toute cette émission le mot vient du
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latin Méo le mérite et Kratos l'État le pouvoir la méritocratie est établit donc un lien direct entre mérite et pouvoir on pourrait dire que c'est d'accéder au pouvoir par le mérite deux petites
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souris tombe dans un saau plein de crème la première souris abandonne très vite la lutte et se noie la deuxième souris ne renonce pas elle se débat tant
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et tant qu'elle qu'elle finit par transformer la crème en beurre et elle sort du saut messieur à partir de cet instant je suis la deuxè sour la méritocratie telle qu'on
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l'entend aujourd'hui c'est un idéal d'organisation sociale qui tend à promouvoir les individus en fonction de leur mérite c'est-à-dire de leur aptitude de leur travail des efforts qu'il fournissent de leur compétences ou
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encore de leur intelligence bref l'idée c'est qu'on obtient une réussite sociale dans une société donnée parce qu'on l'a mériter que c'est le mode de fonctionnement de cette société et donc qu'on est dans une méritocratie
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cette notion de mérite a pris de la place pendant la Révolution française en opposition à la noblesse d'État au système monarchique ouvertement basé sur l'héritage familial Voltaire écrit d'ailleurs en 1770 l'esprit de l'homme
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ne peut imaginer un meilleur gouvernement que celui où tous les pouvoirs sont entre les mains d'une bureaucratie dont les membres ont été admis après de très difficiles examens il affirme que cela récompense la la
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vertu et encourage le mérite il met en avant une notion de sélection par la compétence et la vertu qui préexiste au lumière et n'est en réalité avec les prémisses de l'État moderne comme l'explique Annabelle alouche Richelieu
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parle déjà de la nécessité de choisir ces élites ces élites politico-administratives sur la base des capacités et sur la base d'un concours ce principe de justice fondé sur le mérite n'est bien avant et né en fait de
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la construction des États modernes etat moderne qui pour se développer nécessite en fait de sélectionner ou de choisir plutôt exactement pour prendre un terme plus précis ces fonctionnaires sur la base des capacités et non seulement plus
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sur les origines bref si on simplifie carrément l'idée c'est qu'on crée pas un état efficace seulement avec des gens qui ont hérité mais aussi qui ont mérité et ça ça change la donne mais ce qui va être nouveau avec les lumières c'est
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qu'on introduit la notion de justice si fondamentale aujourd'hui on ne récompense pas les citoyens au mérite simplement parce que c'est plus pratique mais aussi parce que c'est plus juste l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen rédigé le 26
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août 1789 place le mérite au cœur de l'organisation sociale tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toute dignité place et emploi public selon leur capacité et
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sans autre distinction que celle de leur vertuus et de leurs talents dans la foulée en 1794 se créent plusieurs grandes écoles comme le Conservatoire national des arts et métiers l'École normale ou l'École polytechnique pour le
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recrutement par concours sur la base des mérites individuelles afin d'être conforme à l'idéal républicain on y est c'est ça la base de tous les discours qu'on nous sort aujourd'hui l'idéal républicain et cet idéal il est en
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grande partie fondé sur un système scolaire se voulant méritocratique et c'est fondamental de connaître sa jeunèse pour comprendre à quel point nos inconscients et notre système en sont imprégnés parce que l'école en France
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c'est au fondement de cette perception ultra répandue selon laquelle on peut faire tout ce qu'on veut car l'école c'est gratuit et c'est notre socle commun les discours des ministres de l'Éducation nationale en sont d'ailleurs
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régulièrement emprunt c'est ce fameux rôle d'école républicaine méritocratique que met par exemple en avant le nouveau ministre de l'Éducation papend lorsque Jean-Michel Blanquer lui passe le flambeau je suis un pur produit de la
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méritocratie républicaine dans l'école et le pilier l'école ce pilier car non seulement l'école est accessible à tous mais beaucoup de corps de métier sont accessibles par le concours des fameuses
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grandes écoles en France le recrutement par concours dans la fonction publique et les grandes écoles qui naîtront après la Révolution s'inscrivent dans cette idée de faire du pays une méritocratie d'ailleurs après la Révolution l'Empire
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napoléonien se base même quasi totalement sur cette notion et c'est un bouleversement la nouvelle noblesse impériale compte à l'époque essentiellement des parvenus d'encon c'est-à-dire des pauvres qui sont devenus Maréchaud Princes duc et même
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roi de pays étrangers et au fil des transformations politiques on arrivera à la 3e république où Jules Ferry entre autre mettra en place une école publique obligatoire avec de gros moyens créés
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pour donner les mêmes chances à tous à partir de là le système scolaire met donc tous les enfants sur la même ligne de départ en théorie c'est à ce moment que l'égalité des chances devient officiellement l'un des principes
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fondateur de l'école républicaine tous les enfants se voient proposer les mêmes opportunités quel que soi leurs origines sociales selon le sociologue Paul Pascali dans son livre héritocratie La 3e république a permis d'indéiables
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progrès pour les enfants du peuple par rapport à tous les régimes qui l'ont précédé mais attention n'en faisons pas une période idéalisée car déjà à l'époque si cette idéologie méritocratique est puissante elle ne se
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traduit pas dans la réalité elle ne constitue en rien un âge d'or méritocratique pour l'immense majorité d'entre eux les études commençaient à 6 ans et cessai vers 12 ou 13 13 ans sanctionné par un diplôme quelques rares
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miraculés 1 % d'une génération en moyenne poussé encore 4 ans jusqu'au brevet pour devenir instituteur contre- maître ou employés de bureau l'école du peuple pilier de l'imaginaire républicain avait beau être gratuite et
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obligatoire elle restait bien à distance des lycées et collèges fréquentés quasi exclusivement par les enfants de la bourgeoisie de 6 à 18 ans entièrement payant jusqu'aux années 1930 et c'est tout l'objet de cette émission on va pas
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y aller par quatre chemins la méritocratie n'a jamais ex nous ne nous en sommes même jamais approchés si Pascal Pascali explique qu'il y a eu dans l'histoire des formes d'émancipation collective par l'école et la culture il explique qu'il s'agit
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plutôt de rompre avec les illusions mémorielles qui piègent les débats l'idée d'un autrefois glorieux ou plus chanceux revient à évacuer l'histoire des luttes qui tout au long du 20e siècle ont dénoncé sans cesse les faux
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semblants de l'élitisme républicain sa conclusion est claire il n'y a jamais eu d'âge d'or de la méritocratie d'accord pour les classes populaires la reproduction sociale tend à diminuer sur le long terme et aujourd'hui encore elle
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demeure la règle depuis la 3e république nous n'avons pas réussi à mettre en place une méritocratie cette idée selon laquelle l'école corrigerait les inégalités pour mettre tout le monde sur la ligne de départ est encore fausse aujourd'hui
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comme le montrer avec pédagogie cette petite émission d'alternative économique on peut reprocher à notre école de maintenir les inégalités en apportant avantage à ceux qui ont déjà beaucoup le milieu social a un fort impact sur
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l'orientation à note égale un élève issu de milieu défavorisé a deux fois moins de probabilité d'accéder à une seconde générale ou technologique qu'un élève issu d'un environnement favorisé depuis les années 60 le nombre d'étudiants a
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été multiplié par 8 les sociologues appellent cette explosion d'étudiants la massification scolaire non seulement les jeunes font plus d'études mais il n'est plus forcément nécessaire de venir d'un milieu privilégié pour y accéder et là attention je vais av donné pas mal de
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chiffres mais ils sont indispensables pour comprendre en 2014-2015 un peu plus d'un/art des personnes âgées de 25 à 44 ans dont les parents sont peu ou pas diplômés détener un diplôme de l'enseignement supérieur ce qui était
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impensable avant c'est souvent sur ces chiffres que s'appuient les grands défenseurs d'un supposé système méritocratique mais ils oublient bien souvent d'autres données si la massification est réussie les inégalités
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elles perdurent notamment dans les choix des filières et la durée des études les enfants de origine défavorisé ont moitié moins de chance d'entrer en seconde générale et technologique puisqu'ils sont 42 % à y rentrer que ceux dont
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l'origine social est plus favorable ils sont 85 % à rentré les sociologues yel encelem mingi et Laurent Lardeux l'expliquent dans le livre génération désenchanté avoir des parents exerçant une profession libérale intellectuelle
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ou scientifique prédispose à faire des études plus longues 70 % d'entre eux étudient ainsi jusqu'à leur 21 ans ce qui n'est pas le cas lorsqu'on est enfant d'agriculteur puisque que seulement 23 % d'entre eux étudient jusqu'à leurs 21 ans ou d'ouvriers non
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qualifiés seulement 24 %. cette tendance inégalitaire s'accentue dans l'accès aux filières sélectiv moins d'un jeune sur 10 issu des 70 % des ménages les moins aisés entrent en master à l'opposé ils
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sont plus d'un tiers à venir des 10 % les ménages les plus riches l'écart est colossal en une décennie les inégalités à l'école se sont considérablement aggravé en France selon le classement de l'OCDE alors que notre pays était déjà
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le plus mauvais élève du fait de la forte corrélation entre origine sociale et résultats scolaires en France plus qu'ailleurs l'origine sociale détermine les résultats scolaires c'est que l'école ne parvient pas à réduire les
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inégalités elle a plutôt tance à les amplifier par rapport à d'autres pays et les pays qui ont les meilleures performances moyennes sont aussi souvent des pays qui ont plutôt moins d'inégalité comme les pays du nord de l'Europe une tendance confirmée par le
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rapport du knesco sur les inégalités scolaires réalisées en 2016 les auteurs y expliquent que non seulement l'école hérite d'inégalité familial mais qu'elle les amplifie favorisant un effet boule
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de neige entre inégalité de résultats d'orientation de diplôme et d'accès à l'emploi après le diplôme à l'arrivée seul 18 % des élèves issus des familles les plus défavorisées ont un diplôme de
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l'enseignement supérieur contre 68 % pour les enfants de cadre n'en jetez plus tous les chiffres montrent que les mécanismes de reproduction sociale en France aujourd'hui sont sont extrêmement puissants alors pourquoi de telles
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inégalités et bien car l'école ne corrige pas tout le célèbre sociologue Pierre Bourdieu le montrait déjà dès les années 60 les individus sont dotés d'un capital économique social et culturel qui pèse tout au long de leur vie
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aujourd'hui de plus en plus il y a un autre une autre forme de capital qui est ce que j'appelle le capital culturel ce sont des ressources rares inégalement distribuées il y en a qui en ont plus que d'autres et qui du fait de cette
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inégalité de distribution donneent des profits et je pense que aujourd'hui de plus en plus dans les sociétés développées mais même les autres la reproduction des inégalités se fait de
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plus en plus à travers la transmission de capital culturel aujourd'hui l'héritage familial pèse encore très lourd il pèse même plus lourd qu'avant par certains aspects on peut prendre les chiffres d'intégration des grandes écoles notamment de Polytechnique par
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exemple en 1950 3 % des reçus étaient enfant d'ouvriers aujourd'hui ils sont 1 % alors que les ouvr représente près de 20 % de la population à l'inverse en 1950
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50 % des reçus étaient des enfants de cadre aujourd'hui ils sont 80 % alors qu'ils représentent moins de 20 % de la population globale dans ces milieux favorisés culturellement favorisés on a
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les moyens les clés pour produire le bon élève ils sont accompagnés dans leur toutes leurs activité on limite aussi bien aux États-Unis que en France dans ces milieux-là le temps passer devant les écrans on oriente les choix
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culturels il voyageent on développe des talents qui ne sont pas que les talents scolaires mais les talents extrascolaire sportif créativité et cetera ensuite se pose la question des territoires qui
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pèsent là aussi très lourd quand on vit dans un territoire isolé on a moins accès à l'information et on peut plus difficilement partir de chez soi pour aller étudier dans les grandes villes le système français il est extraordinairement complexe notamment ce
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système des filières sélectives et qui ont tendance à être très concentrés du point de vue territorial ce qui fait que beaucoup de familles simpement d'élèves ne sont même pas au courant de l'existence de certaines de ces filières dans les trois plus grandes écoles Polytechnique l'école normal supérieur
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et HC on a 25 % des élèves qui ont fait leur lycée à Paris pas leur classe préparatoire leur lycée les bacheliers parisiens c'est 3 % des bacheliers on n'explique pas ça par l'écart de niveau ou à peine bah ça c'est un facteur
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important il me semble mais ça ne s'arrête pas à l'école et là encore compliqué de continuer à défendre cette idée de méritocratie car les inégalités de départ ne pèsent pas seulement sur le cursus scolaire ça continue dans la vie active le niveau de vie en sortie
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d'étude est fortement corrélé avec la profession des parents les enfants des ouvriers non qualifiés sont surreprésentés parmi ceux qui touchent moins de 1000 € par mois ils en représentent 27 % alors qu'ils ne constituent que 16 % de la population
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totale à l'inverse les enfants de cadres supérieurs sont largement majoritaires au sein de ceux qui sont le plus payés il représente 47 % de ceux qui touchent plus de 5500 € alors qu'il ne constitu
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que 13 % de l'ensemble de la population et ce n'est pas prêt de s'arranger car les politiques actuelles de l'éducation ne tendent certainement pas à gommer les inégalités de départ les conditions d'enseignement se dégradent dans le
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primaire le secondaire et aussi dans le supérieur pour le plus grand bonheur du secteur privé pour la première fois en septembre 2022 on a dépassé la barrière symbolique des 3 millions d'étudiants les établissements qui les accueil
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représente désormais 25 % des établissements d'enseignement supérieur une hausse spectaculaire de 10 % par an contre 0,4 % de hausse dans les universités publiques et qui peut se
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payer ces établissements d'enseignement supérieur privé et bien principalement ceux issus de milieux privilégiés qui n'ont donc pas mérité mais hérité puisqu'il faut débourser entre 7000 et 12000 € en frais de scolarité par an
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dans le privé contre 170 € par an à l'université rajouter à cela le poids des cours particuliers dont le business augmente là aussi chaque année et qui sont payés surprise principalement par les parents les plus privilégiés et pour
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terminer même dans le cas où on a réussi à devenir ce qu'on pourrait appeler un transclasse c'est-à-dire quelqu'un qui a surpassé les déterminismes sociaux et qui a réussi à obtenir une profession bien rémunérée et bien ce n'est toujours pas assez pour réussir à obtenir un
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niveau de vie en fonction du mérite car jusqu'à la fin de votre vie ce déterminisme social nous suit pour ça on va parler immobilier patrimoine le logement en France est massivement détenu par les plus âgés d'entre nous
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pourquoi car ils ont investi dans un contexte favorable et les plus de 50 ans qui ont pu investir avec facilité entre 1970 et les années 2000 s'enrichissent depuis grâce au boom immobilier historique et ce au détriment de tous
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les autres notamment les plus jeunes je vous l'ai expliquer dans cette vidéo sur la crise du logement vouloir accéder à la propriété sans héritage aujourd'hui c'est comme arriver à une partie de monopoie au 10e tour même un travail qui rapporte finalement ça ça suffit plus
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pour s'acheter un bien immobilier dans Paris ou dans les grandes agglomérations françaises et le travail ne suffit clairement pas pour rattraper cette inégalité majeure la dynamique est claire plus le temps passe plus la part
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de richesse que l'on détient a été héritée et non mérité et ce n'est pas moi qui le dit c'est le Conseil d'analyse économique qui assure que la France est une société d'héritier car la part de la fortune hérité dans le
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patrimoine total représente 60 % contre 35 % au début des années 70 là encore je vous renvoie à cette vidéo sur Blast que j'avais réalisé et où on détaillait les mécaniques de reproduction du patrimoine
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via l'héritage on vit dans un monde qui se caractérise par une très grande prospérité des patrimoines quand on regarde par exemple la France la valeur des patrimoines privés représente l'équivalent de 5 à 6 années ou même
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presque 7 années en France 7 ans de revenus national et là encore la dynamique est terrifiante si la génération de mes parents ne jouissait déjà pas de la méritocratie comme on l'a montré dans ce début d'émission la force
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de la reproduction sociale augmente à une vitesse affolante chaque année qui passe en France le patrimoine pèse un peu plus lourd bref résultat selon le CDE il faut en moyenne six générations
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pour sortir de la pauvreté et la richesse n'est clairement pas répartie en fonction de l'intelligence par exemple comme le montre l'excellent monté de la chaîne linguistique à si le mérite existait si l'on vivait en démocratie on aurait une redistribution
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de la richesse typiquement similaire à celle que l'on peut trouver sur la redistribution des résultats de test de QI ou encore des heures passées au boulot en courbe de Gas donc or la répartition de la richesse dans un
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pays ne répond pas à cette courbe et il se trouve qu'on n pas non plus de corrélation entre le fait d'être dans les plus riches les plus talentueux l'un n'impliquant pas l'autre et pourtant dans les figures intellectuelles et populaires les récits
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de transclasse ou transfuge de classe rencontrent un franc succès je vais vous dire à il n'y a aucune noblesse à être pauvre j'ai connu la richesse mais j'ai connu aussi la pauvreté et j'ai choisi la
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richesse à chaque fois parce que quand je suis riche je dois affronter mes problèmes en arrivant dans ma limousine en portant un costume à 2000 dollars une de montre en or qui m'a coûté 40000
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dollars il faut dire que l'histoire est séduisante issue de milieu très modeste alors que rien ne l' prédestiné à ça quelques individus connaissent des destinées extraordinaires c'est pas d'être un bon cogneur qui compte
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important c'est de se faire cogner et d'aller quand même de l'avant c'est de pouvoir encaisser sans jamais jamais flancher c'est comme ça qu'on gagne la sociologue Chantal Jaquet a étudié ses cas spécifiques dans un livre intitulé
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Les transclasses ou la non reproduction on peut prendre l'exemple de deux prix Nobel de la littérature comme Albert Camu issu d'une famille d'analphabète propulsé par son maître d'école et Danny Arnaud fille d'épissier ou encore plus
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récemment de l'écrivain Édouard Louis issu d'un milieu ouvrier et dont le père a connu de longues périodes de chômage ces personnages sont importants car les quelques personnes qui passent à travers les mailles du filet servent d'alibi pour entretenir le mythe selon lequel
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nous vivons dans une société méritocratique alors qu'est-ce qui a fait la différence on présuppose que c'est la volonté ces individus auraient la rage de s'en sortir de s'extraire de leurs conditions pour la sociologue
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c'est un leur la volonté c'est un mot hein mais c'est un mot qui sert à masquer très souvent l'ignorance de ce qui permet un changement de classe puisque quand quand on dit quand on veut
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on peut et bien on se donne d'avance un principe explicatif parce que pour vouloir il faut vouloir quelque chose il faut bien que ce quelque chose a émergé qui a d'autres modèles sous les yeux et je ne dirais pas quand on veut on peut je dirais plutôt quand on peut on veut
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éedouward Louis figure notoire de ce changement de classe refuse d'ailleurs lui-même de servir de caution à cette idéologie il le rappelle il n'a pas eu plus de volonté que les autres il a simplement été rejeté par son milieu à cause de son homosexualité et a donc dû
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composer avec ses nouvelles données on peut avoir parfois l'impression que le transfuge de classe celui qui fuit son milieu celui qui veut se réinventer c'est quelqu'un comme ça qui a toujours été pris de liberté qui a voulu autre chose et cetera moi j'ai voulu montrer
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au contraire que cette trajectoire à un moment donné elle a été vécu comme par défaut que j'ai été jeté qu'avant de reunier mon milieu c'est mon milieu qui m'a reuné qui est incroyable vous dites je voulais pas fuir j'aurais tout donné pour ne pas fuir et pour correspondre
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aux attentes pour être masculin pour jouer au foot pour aimer les filles une autre chimère moderne de la méritocratie I et la fable de l'entrepreneur celui qui partirait de rien prendrait des risques et construirait un business
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lucratif avant de devenir milliardaire je crois beaucoup au fait que dans la vie le meilleur moyen de changer les choses profondément c'est de montrer profondément l'exemple du fait que c'est possible et d'être vraiment aligné avec le fait que c'est possible c'est la
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figure de Steve Jobs de Mark Zuckerberg et autres Jeff Bezos qui inondent nos imaginaires et ne cessent de répéter qu'ils ont travailler pour en arriver là un mythe que démonte Anthony galuzzo que l'on avait reçu sur le plateau de blest
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qui démontre montre que ces entrepreneurs star ont souvent bénéficié d'un milieu favorable et d'un facteur chance pour réussir il y a une dimension légitimatrice c'est vous avez là en fait une élite économique qui concentre tout
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un ensemble de ressources de capitaux voilà de de finan et donc de pouvoir politique puisque quand vous avez une capacité d'investissement gigantesque vous pesez sur la marge du monde très concrètement en fait à partir de là vous légitimer donc un ordre un
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ordre social et pour légitimer vous expliquer en quoi il est juste et pourquoi on est dans dans un ordre juste parce qu'on est sur une espèce de démocratie par le marché où toute inégalité est fondamentalement juste puisque elle s'explique par les actions
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de tout à chacun c'estàdire que on est dans une espèce d'inégalité d'égalité fondamentale où on est tous acteurs sur le marché on peut tous entreprendre on peut tous essayer de de trouver des idées essayer de s'améliorer en tout ce qui est développement personnel et
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cetera et en tant que tel certes on n'est pas responsable de là où on est né mais d'après cette conception des choses on est responsable de là où on est allé et là où on a fini en quelque sorte et c'est bien la question que soulève cette omniprésence de la méritocratie dans les
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récits pourquoi sommes-nous si attachés à cette idée qui a intérêt à ce qu'elle perdure en avril dernier j'ai donné une interview pour le média welcome to the jungle où je réfutais la notion de
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méritocratie clairement la méritocratie est en mythe aujourd'hui ce que j'essaie de démontrer c'est qu'il vaut mieux hériter que mériter c'est sûrement l'une des analyses qui qui m'a valu le plus de haine en ligne de messages agressifs et
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d'insultte parce que remettre en cause la notion de mérite a quelque chose de dérangeant voir de vertigineux nous sommes bibronnés au mérite remettre ça en cause c'est remettre en cause sa propre réussite celle de nos proches c'est remettre en cause la légitimité du
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système dans lequel on évolue et c'est prendre le risque de tomber dans un relativisme absolu et il me semble que c'est ça qui participe à créer des réactions aussi violentes malgré tout ce que l'on vient d'exposer notre notre société continue à nous promettre une réussite basée sur le talent le travail
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l'intelligence la persévérance ça transpire à la télévision avec les innombrables émissions comme la France a un incroyable talent 14 [Musique] juillet Patrouille de
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France tous les talkshow de chant de danse qui visent adresser des exemples de parcours méritocratiqu sans parler des figures des youtubeurs ou autres streamers stars des jeunes qui mettent là encore en avant une dimension
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méritocratique s'ils en sont arrivés là c'est avant tout parce qu'ils ont travaillé parce qu'ils le méritent s'ils ont indéiablement travaillé ce récit probablement sincère vided leur parcours de sa substance politique et participe à
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faire perdurer le mythe méritocratique donc la notion de mérite c'est une notion qui est une sorte de dénomination extérieure que l'on va projeter sur les individus pour
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considérer au fond qu'ils sont responsables de leur destin ce qui est tout à fait commode d'un point de vue politique puisque on pourra ainsi rendre chacun responsable de son sort et cette
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idée disons-le est bien pratique à brandir pour les plus privilégiés d'un point de vue conceptuel et moral la méritocratie est présentée comme l'opposé de système tels que l'aristocratie héréditaire dans laquelle la position sociale d'un individu est
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déterminée par la loterie de la naissance dans un monde méritocratique la richesse et les avantages constituent une rémunération de l'effort et non une obèe provenant d'événement extérieurs et devinez qui sont les plus promptes à
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défendre ce mythe les plus privilégiés indéiablement on réussit pas l'X on réussi pas l' ns l'École normale supérieure sans avoir beaucoup travaillé mais on ne peut pas attribuer les chiffres éloquents par exemple que 64 %
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des des des des gens qui sont dans les grandes écoles sont en fait issu des classes favorisées au seul mérite le problème c'est que ça peut créer des élites qui ont le sentiment de ne rien avoir à redistribuer puisque tout vient
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de leur mérite et non pas et effectivement des chances que la République leura aussi donné alors si la méritocratie n'existe pas au sens de système politique fondé sur le mérite pourquoi nombre de dirigeants de responsablebl politiques de journalistes
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ou d'intellectuels Contin continuent--il à nous sortir ce concept à toutes les sauces et bien car le mythe de la méritocratie a une utilité politique majeure c'est ce qui sert à faire accepter à la majorité un système
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économique et social profondément injuste en bref ça sert à justifier la position des vainqueurs auprès de des vaincu il y a quelques années François béodo faisait sensation sur le plateau de C àou en soulignant le rapport de
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force qui se cache derrière le discours méritocratique vous savez je suis pas un héritier moi je suis né à Amien il y a personne dans ma famille qui était banquier ni politicien ni éarc je pense que la vireulance avec laquelle il se défend est un héritier vaut àveux bien
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sûr du fait qu'il l'est simplement il est il est un sociologue pas assez fin Macron c'estàdire que il pense que l'héritage c'est simplement la transmission direct d'un patrimoine non on sait bien depuis Bourdieu et depuis tout un tas d'autres sociologues et quiconque d'ailleurs observe la société
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s'en rendra compte aussi qu'il y a des courrois d'héritage beaucoup plus subtiles ce que ce que je dois je dois une famille qui m'a appris le sens de l'effort ceux qui m'ont élevé qui m'ont éduqué et après j'ai jamais lâché le
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morceau voilà pourquoi il est si important de comprendre et de déconstruire le discours méritocratique c'est avant tout un obstacle au changement dans son livre la tyranie du mérite le professeur de philosophie
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politique à Harvard Michael sandel conclut la conviction méritocr pratique selon laquelle les individus méritent les récompenses que le marché alloue à leur talent fait de la solidarité un projet presque impossible et si on
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pousse le concept jusqu'au bout même si la méritocratie existait vraiment à quoi ressemblerait-elle exactement si on prend la définition à la base si on imagine un monde où les inégalités seraient corrigées voudrions-nous vraiment que notre société fonctionne
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ainsi en récompensant ceux qui auraient un supposé talent une force de travail supérieure même si l'idée de talent a été formidablement déconstruite par la neuroscientifique samakaraki que l'on avait reçu ici même s'il existait est-ce
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qu'il serait vraiment juste de vouloir récompenser les individus en fonction de prétendus dons naturels est-ce qu'on ne pourrait pas plutôt créer une société solidaire par principe quelle que soi vos aptitudes c'est pour cette raison que le sociologue Pierre Michel manger
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donne cette définition de la méritocratie avec laquelle j'aimerais conclure cette émission la méritocratie est donc un système social problématique qui reproduit légitime et naturalise l'inégalité parce que ce système postule
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que les personnes douées et peu soucieuses d'autrui méritent un statut social une niveau d'éducation une profession revenue plus élevée en vertu de don naturel bref vous l'aurez compris cette
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fameuse phrase quand on veut on peut c'est surtout une phrase prononcée par des gens qui peuvent la société française est profondément reproductrice d'inégalité sociale et si nous ne sommes bien évidemment pas au même niveau de reproduction que celui qui opéit pendant
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l'Ancien Régime par exemple grâce notamment aux acquis sociaux nous ne sommes pas à l'abri de doucement y revenir les plus ardents défenseurs de la méritocratie du Mérite sont souvent ceux qui ont davantage hérité que mérité
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même s'ils ne s'en rendent pas compte prendre conscience de ces inégalité de ces injustices nous semblait indispensable pour deux raisons premièrement car c'est faire justice à ceux qui ne peuvent pas que de ne pas leur laisser porter toute la
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responsabilité de leur échec sur leurs épaules affirmer qu'on vit dans une société méritocratique a finalement quelque chose de très cruel car si on part du principe que ceux qui ont tout méritent ce qu'ils ont c'est aussi partir du principe que ceux qui ont peu
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ou pas que ceux qui sont privés d'accès à des choses aussi fondamentales que de la nourriture ou le logement le mérite aussi c'est normal les pauvres s fait pour être très pauvres et les riches très
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riches deuxièmement il est fondamental de comprendre la force de ces inégalités pour mieux les corriger tout simplement puisque la question de la reproduction des inégalités n'est pas à l'ordre du jour on peut se permettre d'avoir une
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rentrée politique concernant l'éducation focalisée autour de l'ABA et non de la correction des inégalités puisque la majeure partie des gens ne sont pas conscients des dynamiques à l'œeuvre concernant l'héritage on peut continuer à avoir une politique de la taxation
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permettant à une partie de la population de partir dans la vie avec des millions et d'autres avec rien du tout avec une redistribution finalement très faible c'est parce que nous ne nous saisissons pas de ces chiffres de la sociologie que
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la solidarité se délite que les injustices augmentent que les inégalités se creusent et lorsqu'on comprend qu'il vaut mieux hériter que mériter alors peut-être les discours de certains responsables politiques prennent une toute autre
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couleur c'est la fin de cette émission j'espère qu'elle vous a plu c'est la dernière de l'année elle était vraiment importante pour moi donc n'hésitez pas à la partager sur vos réseaux sociaux à me dire ce que vous en avez pensé à la montrer à vos proches à Noël car oui
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pourquoi pas regarder des vidéos de Blast en mangeant de la bûche en famille finalement je vous rappelle que blast est un média indépendant donc si c'est vidéo vous a plu vous pouvez nous soutenir en faisant un don ou en vous abonnant sur
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blast-info.fr et moi je vous dis à l'année [Musique]
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prochaine [Musique] [Musique]
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