Alors maintenant, comment donner une punition efficacement ? Premièrement, la punition ne doit jamais être le seul élément, ni même l'élément central d'un programme de modification du comportement. Elle ne doit y jouer qu'un rôle mineur à côté du renforcement du comportement positif, de l'extinction et d'un bon contrôle des antécédents. Deuxièmement, la punition doit être peu sévère, parce qu'en fait

les punitions sévères ne diminuent pas plus les comportements perturbateurs, et elles engendrent des effets indésirables. Par conséquent, les périodes de privation ou de corvée doivent rester courtes, quelques minutes suffisent. Plus, ça devient contre-productif. Une simple moue désapprobatrice, ça peut être aussi efficace que de pousser de hauts cris et cela aura moins d'effets pervers.

Troisièmement, il vaut mieux éviter d'utiliser comme corvée des activités qui devraient au contraire être valorisées. Par exemple, le fait de faire ses devoirs, de faire du travail scolaire, de lire, d'être en classe, d'être à l'école, tout ça, ce sont des activités qu'on souhaite faire aimer aux élèves. Mais les utiliser comme punition, c'est faire précisément le contraire, c'est s'assurer que les élèves vont les trouver aversives. C'est pourtant ce que font bien des punitions courantes

comme les retenues et les travaux supplémentaires. 4e point, la punition doit être donnée et exécutée immédiatement après le comportement indésirable. Les punitions à retardement n'ont pas d'impact sur le comportement. Cinquièmement, la punition doit être systématique: autant que possible à chaque occurrence du comportement indésirable plutôt qu'occasionnelle. Sixièmement, attention à ne pas y associer par inadvertance du

renforcement positif. Évidemment, donner une punition, ça focalise l'attention sur l'élève en question, ce qui en soi risque d'être déjà un renforcement. Il importe donc de donner les punitions d'une manière qui mette aussi peu que possible l'élève en valeur, qui déclenche aussi peu que possible des réactions des camarades qui renforceraient le comportement indésirable. Si le comportement indésirable est renforcé en même temps que vous donnez une punition,

alors l'effet de celle-ci est nul sur la probabilité ultérieure du comportement. 7e point, bien sûr, toujours rester calme, ne pas crier, ne pas frapper, évidemment, ne pas émettre de jugement de valeur qui tendrait à généraliser, à essentialiser le comportement de l'élève. Il vaut mieux rester concret et dire: "tu as fait ceci et cela, et donc c'est pour ça que tu reçois telle punition" plutôt que: "tu es un..." je vous laisse compléter. On punit un élève pour ce

qu'il fait, et pas pour ce qu'il est. Donner une punition, finalement, ça doit être l'application calme et systématique d'une règle préétablie. Enfin, il est important de ré-évoquer les pièges des punitions. Quels sont les pièges à éviter ? De manière générale, comme on l'a déjà dit, un bon comportement réalisé imparfaitement, ne doit pas être puni. On peut au contraire utiliser le modelage pour renforcer son

amélioration. Deuxièmement, une règle qui est déjà largement admise, mais qui mérite d'être répétée: les punitions collectives ne sont pas une option et sont totalement contre-productives. Pour l'auteur de l'infraction, outre les problèmes généraux des punitions déjà évoqués, ça risque d'avoir encore moins d'effet sur le comportement qu'une punition individuelle, parce que, finalement, une punition subie collectivement, elle a son effet sur l'individu. qui est dilué. Et puis pour les autres élèves, elles sont injustes et elles sont perçues comme telles.

Les effets pervers habituels des punitions sont donc particulièrement ressentis par ces autres élèves. Ils sont multipliés par le nombre d'élèves qui sont punis, et en plus elles n'ont pas le moindre effet positif sur leur comportement puisque eux-mêmes ne sont pas les auteurs de l'infraction. Troisièmement, attention à ne pas utiliser comme punition le retrait de récompenses ou de points préalablement acquis. En faisant cela, vous risqueriez d'annuler les effets des récompenses.

Quelle que soit la nature des récompenses et des punitions que vous utilisez, il doit s'agir de 2 systèmes non convertibles l'un dans l'autre. Quatrièmement, bien sûr, il ne faut pas croire qu'une punition enseigne comment se comporter et ne pas se comporter, ou qu'une punition donne des leçons. Le plus souvent, les élèves savent pertinemment comment il faut se comporter, comment il ne faut pas se comporter, mais comme nous l'avons déjà vu, entre savoir la connaissance théorique et faire,

il peut y avoir un fossé. Ce que l'individu fait à un moment donné, ça ne dépend pas juste de ce qu'il sait, ça dépend d'une combinaison de facteurs, de conséquences éprouvés dans le passé, d'antécédents dont il n'est le plus souvent pas conscient, et qui ne sont pas totalement sous son contrôle. C'est ainsi qu'on peut se retrouver à faire des choses que l'on sait qu'on ne devrait pas faire. Pour être adoptés, les bons comportements doivent être exécutés et répétées de multiples

fois et devenir une habitude. Or, aucune punition n'enseigne ni ne renforce des comportements nouveaux. C'est pour cela que le renforcement du comportement positif, et le cas échéant, le modelage et la simulation, sont indispensables. Les punitions ne peuvent en être que des compléments. Enfin, parlons du piège de la punition ou de ce que l'on appelle aussi la trappe à punition. Donner régulièrement des punitions, c'est un piège, et ce sont

nous, les adultes, les enseignants, qui tombons dedans. Voici comment ça fonctionne. Tous les facteurs qui ont été décrits ici, qui conditionnent les comportements des élèves, Et bien, ils fonctionnent aussi chez les adultes, chez les parents et les enseignants, qui sont des humains comme les autres. Donc nous aussi nous avons tendance à répéter les comportements qui sont immédiatement suivis par une récompense. Lorsqu'un élève a un comportement perturbateur, si nous lui crions dessus et si nous réagissons de

manière agressive ou sévère, ça a généralement pour effet immédiat d'interrompre ce comportement perturbateur. Et cette efficacité immédiate, ça constitue pour nous une récompense, ça renforce notre comportement de réagir de manière colérique, agressive, et qui va donc avoir tendance à se répéter. Du coup, peu importe que ce comportement punitif ne diminue pas les comportements perturbateurs de l'élève sur le long terme. Pour nous, il est renforcé.

Ce qui importe, c'est que notre cerveau a perçu une conséquence positive immédiatement après notre comportement, il n'en faut pas plus pour que le comportement se répète. Et alors ? On est tombé dans le piège de la punition. Il est bon d'en être conscient pour éviter de tomber dedans.