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Bienvenue sur ce troisième épisode des webinaires intitulés "Comprendre ses élèves". Donc des webinaires dont le principe est de donner la parole à des chercheuses ou des chercheurs qui se sont intéressés au vécu des élèves notamment dans l'enseignement agricole, et également l'idée c'est de pouvoir échanger avec eux, et d'entendre le point de vue d'un professionnel de terrain
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sur ces questions là. Et j'ai le plaisir d'accueillir aujourd'hui Julie Blanc Julie Blanc qui est maitresse de conférences rattachée à l'ENSFEA et à l'UMR EFTS, Education, Formation, Travail, Savoirs. Julie Blanc va donc évoquer la bienveillance éducative du point de vue d'élèves de l'enseignement agricole. Je remercie également pour sa présence Eddy Homri,
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Eddy Homri, qui est enseignant en mathématiques-physique-chimie au lycée agricole de Cognin près de Chambéry. Eddy est également membre du GAP, du Groupe d’Animation et de Professionnalisation physique-chimie où il est spécialisé notamment sur l'évaluation par capacités. Donc c'est le moment pour moi de laisser la parole à Julie Blanc
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pour une vingtaine de minutes. Bien merci Audrey, bonjour à toutes et à tous. Donc je vais débuter cette présentation directement donc qui s'intitule : "La bienveillance éducative : qu'en disent les élèves ?". La bienveillance éducative, bien qu'étant un concept mou, flou, cela fait quand même un certain nombre d'années
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que nous en entendons parler, et ce dans différents champs : le travail, les médias, l'école... La société en général. Donc à l'école elle est souvent appréhendée, elle est souvent exprimée par le regard des adultes, via le regard des adultes. Et ce que nous allons tenter d'explorer ici, c'est comment elle se traduit du côté du vécu des élèves.
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Donc, mon propos s'articulera autour de quatre points principaux : le premier étant l'héritage théorique de la notion de bienveillance, dans un second temps je tenterai de caractériser de manière plus précise et peut-être plus concrète cette notion là, et par la suite je présenterai le point de vue des élèves à travers une analyse issue de deux recherches,
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et enfin j'apporterai quelques éléments conclusifs et d'ouverture. Donc pour ce qui est de la filiation théorique et on verra, également, idéologique de la notion de bienveillance alors... à grands traits ! on peut déjà se dire que la bienveillance prend racine dans les techniques de communication non violente développées par Marshall Rosenberg elles-mêmes largement inspirées de l'écoute active de Carl Rogers
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donc ce sont deux techniques qui sont centrées sur la personne, et donc ce sont deux psychologues américains : Rogers et Rosenberg. Le concept de bienveillance il est aussi marqué par les théories du "care" qui ont été aussi développées par la psychologue américaine Carol Gilligan donc qui a édité un ouvrage de référence au début des années 80 sur cette question,
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et donc le "care" signifie : l'attention au bien-être d'autrui, prendre soin les uns des autres dans l'écoute et le respect. Donc à la fin des années 80 a vu aussi le jour la convention des droits de l'enfant qui affirme le droit de l'enfant à être considéré comme une personne à part entière. Et on verra que ça aussi, ça peut impacter sur ces notions de bienveillance. Parallèlement à ça, l'émergence...
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des neurosciences et notamment l'évolution de la connaissance du cerveau qu'elles permettent de mettre au jour, montre le rôle des émotions dans les apprentissages et en parallèle les bénéfices de l'empathie. Donc je rappelle que l'empathie se retrouve dans la liste des compétences psychosociales qui sont elles-mêmes décrites par l'OMS comme autant de capacités essentielles à la bonne santé. En clair, il est bon de développer des capacités de bienveillance
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notamment à l'école. Et l'école peut être véritablement un terrain d'action pour les développer. je fais une petite parenthèse donc du coup par rapport à l'enseignement agricole on voit que les compétences psycho-sociales apparaissent véritablement dans les nouveaux référentiels et je parle... du BAC Pro en particulier. Et enfin la notion de bienveillance apparait explicitement dans la loi de refondation de l'école de 2013
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et par conséqent dans les référentiels de compétences des métiers du professorat et de l'éducation. Donc cette compétence, elle est celle-ci : c'est installer une relation de confiance et de bienveillance. Elle apparait également, la notion de bienveillance, dans les circulaires de rentrée qui suivra en 2014 où il est mentionné : "L'école de la république doit faire preuve de bienveillance". Donc je précise que cette notion ne sera pas oubliée les années qui suivent
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elle ne sera pas oubliée non plus avec la loi pour une école de la confiance de Jean-Michel Blanquer... plus récemment. Donc on peut aussi se dire avec ça que la bienveillance, elle est désormais une prescription. Alors, pour ce qui est de la tentative de caractérisation de la notion, donc si on regarde la définition le mot bienveillance renvoie directement à "veille au bien-être"
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étymologiquement vouloir le bien-être d'autrui. Mais pour parvenir à une caractérisation plus exhaustive rattachée à l'éducation je me suis appuyée sur des définitions de pédagogues de philosophes de l'éducation que j'ai complétées par des travaux de recherche dont vous avez les références ici, Saillot et Réto notamment. Et donc ces travaux de recherche s'appuient sur les représentations et les pratiques des professionnels de l'éducation
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donc les enseignants, les CPE, les personnels de direction. et donc s'appuient sur... il faut le préciser, sur des pratiques, on va dire déclarées, de professionnels. Donc cette revue de littérature, elle me permet de distinguer dans un premier temps deux volets... interconnectés, Donc la qualité de la relation... et un volet plus pédagogique qui relève des gestes professionnels reliés aux questions d'apprentissage.
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Alors, du coup que disent les professionnels de l'éducation quant à la qualité de la relation ? Alors, ils parlent effectivement de l'accueil et de tous les aspects non verbaux qu'il comporte, donc le regard, le sourire. Il est question aussi de disponibilité, il est question de souci, d'attention à l'autre, il est question de respect, il est question d'écoute, de dialogue,
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avec en toile de fond... l'empathie et l'humilité. Il est question aussi de relation de confiance, alors cette relation de confiance... elle va cibler aussi bien l'élève que sa famille et il est aussi question d'humour. Pour ce qui est du volet pédagogique, donc des gestes professionnels qui mettent en jeu les apprentissages donc les professionnels de l'éducation évoquent la question de l'éducabilité.
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Donc qu'est-ce que c'est qu'éducabilité ? c'est un principe qui consiste à toujours croire en l'évolution, aux progrès, et aux capacités de l'élève, justement, à progresser. Ils pointent également la valorisation des réussites, des efforts, ils pointent l'encouragement, le renforcement du sentiment de compétence, Ensuite ils pointent des éléments qui sont un petit peu plus techniques... dans la relation enseignement apprentissage qui sont les "feedbacks"
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Donc le "feedback", c'est ce qui permet d'agir sur le raisonnement, sur le rapport au savoir, sur la motivation et l'estime de soi. Il est aussi question sur le plan technique de différenciation pédagogique. Donc là il s'agit pour les enseignants, pour les formateurs, de s'adapter aux différences de rythme, de capacités des élèves. Et enfin il est largement question d'aide, de soutien, d'étayage,
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quand il s'agit d'évoquer la bienveillance. Les professionnels de l'éducation évoquent aussi ce qui relève de la sanction et notamment de son traitement impartial. Donc on le voit ces deux volets sont inter-reliés, donc la qualité de la relation et la qualité de la pédagogie, mais ils le sont également par l'existence d'un cadre clairement défini, car la bienveillance rime pour eux donc,
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avec "exigence", et avec "limite à poser". Donc ce cadre, il doit garder selon eux une certaine souplesse, il doit être juste, hospitalier, protecteur, sécurisant. En conséquence, du point de vue des professionnels, ce n'est pas du laxisme, ce n'est pas de la complaisance, ce n'est pas favoriser tel ou tel, ce n'est pas fermer les yeux.
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Je rajouterai que pour Prairat, la bienveillance est une vertu qui fait partie de l'éthique de l'enseignant, qui fait partie de l'éthique enseignante, et au même titre finalement que la justice, et que le tact. Alors j'en viens maintenant en ce qu'en disent les élèves de l'enseignement agricole. Donc je me réfèrerai ici, donc, aux résultats de deux recherches qui ont été effectuées dans l'enseignement agricole,
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auprès d'élèves de classes dites "entrantes", des quatrième et des seconde, conduites avec Audrey Murillo donc, ici présente, Hélène Veyrac et Philippe Sahuc pour l'une, Audrey Murillo et Hélène Veyrac pour l'autre. Donc ces recherches ont donné lieu à plusieurs publications et dont les références vous ont été mises à disposition. Donc même si ces deux recherches ont convoqué des méthodologies de recueil différentes
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elles s'appuient toutes les deux sur des propos d'élèves qui sont relatifs à leur vécu dans le lycée et dans la classe. Alors en début d'année, et également dans les quelques mois qui ont suivi. Elles consacrent par conséquent une large part à la subjectivité des élèves et à la compréhension de celle-ci. Donc la manière de présenter la recherche et d'interroger les élèves est à peu près semblable dans les deux recherches, par contre il s'agissait d'introduire l'entretien
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car en effet nous avons conduit des entretiens avec des élèves en précisant que nous nous intéressions à la façon dont les élèves percoivent leurs cours, leurs enseignants, et en quoi cette perception est susceptible d'avoir des effets sur leurs propres attitudes, sur leur propre comportement en classe, et dans leur rapport aux apprentissages. Tout ceci bien-sûr après avoir posé un cadre de confidentialité qui était requis.
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Donc au total sur ces deux recherches on a interrogé quarante-deux élèves donc vingt-et-un dans une première donc qui concernait des quatrième et des seconde professionnelle, et vingt-et-un dans une autre qui concernait des seconde générale et technologique. Nous avons traité ces données de manière qualitative. Alors... pour ce qui est des résultats et de ce qui nous occupe là aujourd'hui
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j'ai analysé les propos des élèves par le prisme des grands axes de définition... qui ont été donnés par les professionnels et par la revue de littérature que je viens de présenter... et... pour vous dire aussi en préalable que lorsque les élèves catégorisent leurs cours, ou bien s'expriment sur leurs professeurs ou leur vécu de classe, ils évoquent spontanément des aspects relationnels, des aspects également de climat, de climat de classe, de climat scolaire,
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donc là que l'on voit moins dans les définitions des professionnels. Ils s'intéressent moins à des aspects plus pédagogiques ou didactiques, alors en fait ça veut pas dire que ces aspects pédagogiques ou didactiques sont moins présents mais en tous cas c'était moins prégnant dans leur discours. Donc sur la qualité de la relation maintenant, donc si on examine cette dimension là, stricto sensu, ce qui est pointé par les élèves relève de la communication on va dire
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plutôt du verbal, du non verbal, ou relève également de postures. Donc là je vais donner des exemples avec des verbatim, discours d'élèves. Donc on a par exemple Lily en seconde générale... donc je précise que les prénoms ont été anonymisés. Donc Lily elle nous dit : Donc là... spontanément Lily nous fait une comparaison avec les professeurs de son lycée et les professeurs du collège
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parce que l'entretien se déroulait en début d'année. Alors un autre exemple avec Mathias en seconde générale et technologique, alors Mathias nous dit en parlant d'un de ses professeurs : Donc on voit ici qu'il est question, dans ces deux exemples parmi de nombreux autres... de gentillesse. Donc les élèves ne parlent pas stricto sensu de bienveillance mais parlent plutôt de gentillesse. Ce que l'on peut dire c'est qu'elle est tout simplement associée
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à de la compréhension, à de la proximité, à de l'empathie, à de l'humour. Tout ce qu'on a vu qui finalement, peut relever de la notion de bienveillance. Ce qui me semblait aussi important de relever ici, c'est le principe de réciprocité dans la relation. C'est à dire... eh bien ! Les élèves nous disent : "Il est sympa, on va être sympa en retour. Il nous comprend, on va avoir envie d'écouter."
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Donc ces résultats là... ils viennent corroborer des résultats plus anciens et notamment que l'on peut retrouver dans la méta analyse de Hoy et Weinstein qui démontre que l'enseignant qui est dans la considération de ses élèves aura toutes les chances d'obtenir de la considération en retour. Donc sur le volet pédagogique maintenant... Donc on a Coline de seconde générale et technologique qui nous dit :
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Donc... on a un autre exemple... Agathe qui nous dit : Et par contraste, on va avoir d'autres élèves qui vont nous dire... Martin par exemple en quatrième qui nous dit : Et on a Elise qui nous dit également : Donc on voit que ces exemples ils illustrent le fait que les élèves sont très attentifs à la compréhension du cours. Ce qui les importe finalement c'est bien de comprendre, et de se sentir aidés pour ce faire.
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Ils sont sensibles aux professeurs intéressés et intéressants, ainsi qu'à la capacité des enseignants à mettre en confiance, et du coup à accorder une place à l'erreur. On a bien vu que les élèves, en fait, dans leur discours, ils mêlent un peu les questions de qualité... de la relation et les questions aussi d'habileté pédagogique de leurs enseignants, mais ils y ajoutent de manière très importante
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la notion "d'ambiance" que j'ai moi traduit en "climat". On saisit donc ici, une sorte de tryptique vertueux, donc un enseignant qui sait initier la relation, qui sait accueillir, qui sait transmettre, donc il est intéressant et il est intéressé. Et qui sait également créer un climat détendu et propice au travail. Alors on a quelques exemples ici aussi,
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dont Claire en seconde qui nous dit : Par contraste, on a d'autres exemples, qui mettent en avant des situations d'inconfort ressenties, vécues par les élèves. Donc on a Maurine en quatrième qui nous dit... qui nous parle de ses professeurs et qui nous dit : Donc là, à travers les propos de Maurine, on peut percevoir peut-être un hiatus entre son ressenti, son vécu...
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donc un vécu d'humiliation hein donc... d'absence de bienveillance pour le coup, et probablement l'intention pédagogique du prof qui elle pouvait être plutôt bienveillante, et qui était dans l'idée d'aider Maurine et ce faisant en la faisant passer au tableau. Donc un autre exemple de situation d'inconfort on a Elisa qui nous dit : Donc on voit bien à travers ces exemples que la qualité de la relation
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elle va jouer aussi sur le climat, et sur la mise au travail des élèves, sur leur concentration. Et on peut voir également que les situations d'inconfort qui sont vécues en classe elles peuvent aussi influencer les dispositions aux apprentissages pour certains élèves. Alors pour certains elle va les inhiber, Et pour d'autres elles peuvent aussi nuire à l'engagement,
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à la mobilisation, et in fine, aux apprentissages. Alors, en guise de synthèse, on va dire, de manière un petit peu partielle, et sans rentrer dans quelque chose de trop et de très dichotomique, voire de manichéen... Je voulais vous montrer ceci parce que les élèves parlent effectivement... Donc dans le vocabulaire des élèves on a les profs gentils, les profs sympas
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et on a aussi les profs sévères, les profs stricts. Et ce dont on s'aperçoit c'est que la sévérité en fait elle revient très souvent dans le langage et dans le vocabulaire des élèves et on s'est aperçu que ce mot comportait deux valences : une sévérité juste, et une sévérité, on va dire, excessive, voire abusive. Et donc lorsque...
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elle perçue cette sévérité comme juste et non abusive, et lorsqu'elle est associée à un cadre, et à des limites qui sont raisonnables elle n'est pas remise en question par les élèves. Donc on a l'exemple d'un élève qui nous dit : "Cette prof elle est très sévère, mais si tu écoutes les règles, que tu fais le boulot qu'elle demande, elle est gentille, elle nous laisse faire des choses." On a un autre élève qui nous dit : "Il y a quelques profs qui sont très stricts
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mais qui peuvent être super sympas, qui se font respecter et ça, c'est agréable." Donc là, on voit, ce qui est pointé c'est l'importance en fait du cadre. Se faire respecter c'est aussi être garant d'un cadre et de règles, qui sont du coup aussi, acceptés par les élèves. Donc on a... les profs sévères, stricts, et on a dans le discours des élèves les profs qui sont trop stricts, trop sévères.
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Donc l'exemple c'est Claire qui nous l'apporte, et qui nous dit : "C'était un prof trop sévère. Donc si tu réussissais pas à faire une chose correctement, bein il te disait que tu étais nulle. Si par exemple on courrait pas assez vite, il nous engueulait, il nous criait dessus." Donc là on voit que "trop sévère", "trop strict", eh bien pour le coup réfère à un climat qui va être méprisant,
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qui peut être humiliant, à travers les cris, et à travers aussi certains propos. Et donc en parallèle on a les profs trop stricts, qui pour le coup ne répondent pas à la définition de bienveillance. Et en parallèle on a également des profs qui sont trop gentils, et on verra que ça ne répond pas non plus à la notion de bienveillance... à travers l'exemple de Clément qui nous dit : "Le problème avec madame B. c'est qu'elle est trop gentille,
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et ça finit qu'il y en a beaucoup trop qui font des conneries.". Donc "trop gentille" ici est à entendre comme laxiste, comme trop permissive... soit donc dans une conception de l'autorité qui serait plutôt évacuée, voire non exercée. Donc finalement être trop gentil, ce n'est pas être dans la bienveillance telle qu'elle est spontanément décrite par les élèves,
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et telle qu'elle est également décrite par les enseignants, ce qu'on a vu en début de présentation. Donc finalement ce qui répond à la question de la bienveillance, ce qui répond plutôt à la caractérisation de la bienveillance y compris du point de vue des élèves, c'est ce que vous allez retrouver dans les carrés de couleur. Donc en guise de conclusion... du bénéfice de la bienveillance alors si la relation éducative se caractérise par de la bienveillance,
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c'est-à-dire de l'intérêt porté aux élèves, du respect, de la reconnaissance, de la valorisation, de la confiance, de la sécurité, de l'humour, l'élève se sentira davantage impliqué, et sera peut-être plus disposé à apprendre, Alors ce n'est pas nouveau que de dire cela, mais cela reste quand même d'actualité, une relation bienveillante ne suffit pas à faire apprendre, mais elle est une condition favorisante pour certains élèves,
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et elle est une condition même nécessaire pour d'autres élèves. Alors ensuite, on parle de bienveillance mais la bienveillance est une posture, c'est une relation qui est à créer, et qui est à recréer. Elle n'est pas donnée d'avance cette relation, elle n'est pas posée à jamais. la relation s'entretient, se cultive, elle requiert une présence dans l'ici et le maintenant, une écoute, une attention à l'autre,
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et une attention à la manière dont va réagir l'élève. Et tout ceci demande un investissement, qui est important, demande du temps pour ce faire, et peut-être pour certains d'entre nous... demande aussi un travail sur soi. Je terminerai rapidement sur ce point là qui est en fait le vécu, le ressenti des élèves qui peut être considéré comme un support pertinent de réflexion individuelle et collective
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au sein des établissements scolaires donc qui va permettre, qui va nous permettre, qui va permettre aux équipes de réfléchir à un cadre socialisant et sécurisant pour les élèves, et qui va aussi permettre aux équipes de réfléchir à un cadre éthique, justement, à l'usage des professionnels, c'est-à-dire en gros... lorsqu'on est CPE, lorsqu'on est enseignant, lorsqu'on est formateur, lorsqu'on est proviseur, qu'est-ce qu'on peut se permettre,
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et qu'est-ce qu'on ne peut pas se permettre. Voilà, je vous remercie de votre attention. Merci beaucoup Julie ! On va prendre une petite dizaine de minutes pour prendre les questions et les remarques des participants. Et après on écoutera Eddy pour sa réaction. Alors on a une première remarque... d'un chercheur qui s'appelle Yves Reuter et qui a mené des recherches
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sur le vécu des disciplines scolaires par les élèves, et qui nous indique que tes résultats, ce que tu présentes recoupent globalement les résultats qu'il a également montrés. Et il te demande si tu as constaté également des variations selon les disciplines scolaires ? Par exemple dans les catégorisations des enseignants ?
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Alors, non il n'y avait pas franchement de différences à travers des disciplines même si les élèves ils sont... ils sont quand même sensibles... pour certains notamment les quatrième... à certains aspects liés aux disciplines c'est-à-dire les disciplines où... l'on se sent bien parce qu'on est dehors alors que dans certaines displines on est... je parle des disciplines techniques là pour le coup,
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alors que dans d'autres disciplines on est en classe, on est dans un contexte plus contraint, etc. Pour autant, s'ils ont fait ces catégorisations là... ça joue pas non plus sur la qualité... sur les questions de bienveillance en fait, ils ne les abordent pas de cette manière là... Donc oui, globalement... les élèves ont un discours assez...
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enfin, le discours des différents élèves, que ce soit sur leurs cours ou leurs enseignants, est assez... assez consensuel, on se retrouve... ce sont des discours qui se rejoignent beaucoup. Merci Julie. Il y a une autre question sur... bein les questions posées aux élèves et est-ce qu'il y a eu des questions sur le rapport des élèves à l'écrit ? Avec des exemples comme...
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l'encre rouge qui peut être utilisée pour corriger, les ratures, les commentaires des enseignants, la notation. Est-ce que ce volet là a été investigué ? Non, pas particulièrement. on était vraiment... dans des entretiens avec une démarche d'entretiens de type très très ouverte, on était plutôt dans l'explicitation, on a vraiment essayé, dans une approche compréhensive, de s'attacher vraiment au...
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au discours de l'élève sans trop, justement, interférer sans trop... proposer. Donc en fait ils étaient... voilà ils nous ont donné des éléments... Alors on relançait bien évidemment mais on ne proposait pas. On était pas dans une démarche d'entretien trop dirigé. Donc c'est la raison pour laquelle on a peut-être pas obtenu ce type d'informations. Deux questions qui se rejoignent
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autour du fait de crier sur les élèves, d'être fâché. Alors une question sur : "Est-ce qu'être bienveillant, être gentil ça veut dire ne jamais se fâcher ?". Et une autre question sur : "Est-ce qu'il n'est pas nécessaire pour les enseignants d'être en paix avec eux-mêmes afin de moins crier sur les élèves ?". Alors, je vais commencer par la deuxième remarque. En fait, être en paix avec soi, oui ! En tous cas être authentique !
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Et être... peut-être... C'est ce que je disais un petit peu dans la conclusion, c'est-à-dire effectivement... Donc la relation ça fait partie du travail d'enseignant, c'est quelque chose que l'on doit penser, que l'on doit poser, et effectivement dans cette démarche là... On peut être aussi dans un travail sur soi, pour pouvoir travailler sur ces questions là. Sur ce qu'on peut accepter...
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et ce qu'on accepte pas nous. Et donc effectivement tout ceci peut nous aider, tout ce travail là de réflexion peut nous aider à... à créer une relation... et à être justement bien dans cette relation là quoi... Bien avec soi-même j'entends. Pour la première question, il était pas du tout question de ça avec... là je reprends le propos des élèves avec l'histoire d'être "trop gentil"
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parce qu'au contraire être "trop gentil", eux ça leur convient pas... parce que l'enseignant doit se faire respecter, doit poser un cadre et doit se faire respecter. Alors un enseignant qui ne se fait pas respecter c'est pas quelqu'un qui est nécessairement dans la bienveillance, parce qu'il va créer... parce qu'il va y avoir dans la classe de l'agitation... du désordre... et que du coup ça peut être aussi perçu par les élèves comme quelque chose de...
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de négatif en fait ! Peut-être aussi un manque de sécurité etc. Donc, se fâcher ? Mais tout dépend de ce qu'on entend par se fâcher. Ca veut pas dire en tous cas être laxiste et être... dans l'absence de règles ! Donc se fâcher quand les règles elles n'ont pas été respectées... Oui effectivement ! Il faut reposer le cadre, et si se fâcher consiste à reposer le cadre...
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je pense que là... on reste dans... dans une qualité de relation en tous cas... Alors ce que je te propose Julie c'est de répondre très rapidement à une dernière question et ensuite je listerai les autres questions qui ont été posées pour donner matière à réflexion mais sans forcément que tu puisses y répondre pour qu'on puisse écouter ensuite Eddy. Donc une question qui me parait importante : "Quels sont les leviers que tu identifies pour améliorer le relationnel entre élèves et enseignants
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lorsque des tensions se font sentir ?". Alors justement lorsque les tensions émergent et que l'on est vraiment dans la volonté justement de... de régler cela ! Alors je dirais qu'il faut... être... Alors on a parlé d'authenticité, il faut être dans l'authenticité et je dirai qu'il faut être dans l'échange pour le coup Et dans... dans l'échange avec les élèves ! Avec une...
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un rapport de confiance ! C'est-à-dire accorder de la confiance aussi aux élèves pour qu'ils puissent s'exprimer sur les situations de tension. Et être peut-être dans la collaboration, dans la coopération, dans la co-construction de solutions pour ce faire donc c'est-à-dire être dans l'échange avec les élèves et proposer... et proposer ensemble... faire en sorte que les élèves soient participatifs
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et proposent eux-mêmes des pistes de solutions. Ok ! Alors bon on va être un petit peu frustrés. On va juste lire les questions et les remarques des uns et des autres. Et puis ça peut quand même nous inspirer pour la suite, alors... Un premier participant nous demande... nous propose de... de bien définir l'empathie, et notamment bien différencier les aspects émotionnels et cognitifs pour aller plus loin.
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On a également un participant qui propose de s'intéresser au contexte notamment, collège ou lycée avec l'exemple que tu as donné, et de prendre en compte le fait que ce contexte peut jouer dans les postures des uns et des autres, enseignants et élèves. Une autre spectatrice qui nous indique que sans parler de cris il y a peut-être un gros travail à faire en tant qu'enseignant sur le choix des mots.
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Une autre réflexion sur les réunions d'harmonisation d'examens où être bienveillant est parfois une manière de faire glisser le sens du mot vers une générosité qui peut être excessive. Et enfin une remarque sur l'enseignement qui est un métier de la relation qui est une thématique assez forte chez nos amis québecquois et la question n'est-elle pas l'appropriation du référentiel des métiers du professorat parue en 2013
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et renforcé en 2016 pour l'enseignement agricole et au final souvent inconnu des collègues ? Une question d'inspecteur donc. Merci beaucoup pour vos remarques, vos questions. On donne tout de suite la parole à Eddy Homri en direct de sa salle de classe. Oui, salle de réunion ! Donc beaucoup de choses, je vais essayer d'être très clair.
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En fait le terme bienveillant, chez nous les profs, il nous a été un peu imposé, et pas toujours bien expliqué ou bien explicité. Sauf si l'on faisait le travail d'appropriation du référentiel mais des fois c'est un peu difficile de bien toujours se tenir à jour. Moi j'ai fait ce choix là de bienveillance c'est pas parce que c'était à la mode mais parce que c'était un levier pour l'élève.
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Je rappelle qu'un élève, il a 55 minutes de relation avec un enseignant et qu'il y a beaucoup de choses. Donc il y a le cadre mais aussi il y a la matière. Et moi je fais pas la matière la plus sexy au monde, je fais mathématiques-physique-chimie, où déjà un élève arrive avec des a priori de base. Surtout, je vais, là, pour rebondir sur la question d'un participant, je vais bien différencier le collège, quatrième/troisième de l'enseignement agricole, et le lycée.
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Quand ils arrivent en quatrième, c'est le milieu du cycle 4 et c'est là où on commence à vraiment embêter les élèves avec le calcul littéral. Et on entend cette fameuse phrase qui est : "Moi, j'y arrive les maths, sauf dès qu'il y a des lettres, là vous m'avez perdu monsieur, c'est de votre faute.". En fait, très vite on se rend compte que l'élève a gardé cette émotion... d'échec. Et donc comme il a gardé ce souvenir d'échec
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je vais le remettre dans cette condition là, dans cet exercice, mais si je peux lui faire toutes les activités "flash" avant pour le remobiliser, pour le remettre en confiance, si je n'ai instauré un climat de confiance et de bienveillance en lui disant : "C'est bon ! T'es dans le cadre où tu peux te planter. T'inquiète ! On va trouver des solutions.". Eh bein, en fait je vais avoir aucun effort de sa part, je ne vais pas avoir d'engagement. C'est donc la notion d'engagement qui est le plus important.
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Pour rebondir aussi sur une question d'une des participantes qui disait : "Ouais, mais quand est-ce que l'on peut se fâcher, ou quand est-ce que l'on ne peut pas se fâcher ?". Moi, c'est l'oubli du matériel. Par exemple pour les collégiens, je suis... Ok, le collégien me signale qu'il n'a pas son matériel, encore une fois, je suis dans l'entretien individuel. J'ai pas besoin de rentrer dans une colère monstrueuse devant toute la classe, c'est du cinéma, ça ne sert à rien. Et ça nous fait perdre en plus du temps et de la confiance,
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une relation de cadre avec les élèves parce qu'ils vont avoir cette impression très rapidement que je m'emporte pour rien, que ça concerne qu'un élève, pas toute la classe, pourquoi il fait un rappel, encore et encore... Je m'énerve un peu plus, ou plutôt, entre guillemets je me fâche quand j'ai un élève qui me dit : "Oh monsieur là je comprends rien, j'ai abandonné à la question 2." Je vérifie, je "check-up" très rapidement avec les autres élèves où ils s'en sont arrêtés,
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et si je considère qu'au vu des capacités de l'élève il peut mieux faire, je peux rentrer un peu plus dans cette posture où j'attends plus de lui et je veux un meilleur engagement de lui. En fait, ce qui est très difficle c'est que comme vous l'avez dit sur les notes de jury, le mot bienveillance, pour les compétences en fin de troisième, quand on doit attribuer les points pour le brevet ça devient une marque un peu en mode :
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"Ah ! Bon bein il faut être bienveillant, on le note... On lui met le point supérieur...". En fait c'est pas du tout ça ! C'est pas parce que l'administration... Certaines administrations ! Je vais bien faire attention à mes mots. Une certaine administration a pris le terme bienveillance pour faire passer des fois des... des objectifs comptables !... qu'on doit utiliser ça... Non ! La bienveillance c'est une exigence, comme l'a fait remarquer Julie,
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qui est nécessaire donc... le truc c'est, on nous l'a imposé, nous enseignants, sur le terrain et on a pas toujours eu le temps de bien comprendre ce qui était derrière ce terme là. Je finirai sur : la bienveillance me permet aussi de gagner du temps dans la gestion de conflits. Ce n'est pas parce que j'essaye d'être le plus bienveillant au monde d'avoir une relation avec les élèves... il y aura des conflits. Il y aura des conflits parce que parfois je suis pas dans un bon jour,
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il y a des fois, les élèves sont pas dans un bon jour, des fois il y a des incompréhensions. Mais si je me suis mis depuis septembre sur un travail de bienveillance, d'un cadre, je vais avoir le temps de comprendre ce qui se passe et surtout les élèves vont très vite me rendre un "feedback" un peu plus sympatiquement que s'ils me répondent méchamment et agressivement. Pourquoi ? Parce qu'il y a une relation depuis septembre qui est construite, créée, recréée à chaque séance pour me permettre ça.
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Pour... finir ! Il faut se rappeler, des fois on l'oublie, mais on est un adulte pour l'élève. Et des fois l'élève, dans n'importe quelle situation, il peut se retrouver face à huit, neuf adultes, et ça se passe pas bien avec huit, neuf adultes. Moi je suis dans une matière, maths-physique-chimie, où des fois c'est compliqué pour l'élève, le niveau de l'exercice, au niveau de la compréhension,
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au niveau du chapitre... Je ne veux pas non plus qu'il soit en conflit personnel. Je ne sais pas ce qu'il se passe à la maison et... techniquement, je ne me consacre que sur ces 55 minutes. Je ne veux pas savoir s'il s'entend ou pas, je ne veux pas savoir. Moi je veux que quand il rentre dans ma salle il se sente à l'aise, capable, possible, et même s'il n'y arrive pas, on va essayer de trouver encore et encore des méthodes d'organisation. C'est ça en fait qui est important.
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C'est de se dire que chaque élève quand il rentre dans votre séance c'est que vous avez 55 minutes de partage, même si des fois ça ne passe pas, même si des fois il y aura des mauvaises séances, même si des fois il y aura une obligation de rappeler le cadre, il faut qu'à la fin de ces 55 minutes il se dise : "Ok ! Quand est-ce qu'est le prochain cours ?". Merci beaucoup Eddy ! Merci à Julie et merci aux participants ! J'ai mis dans le fil de discussion
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un lien vers les références bibliographiques qui ont été citées, parmi ça un travail qu'Eddy Homri avait mené lors de son passage à l'ENSFEA il y a quelques années. - Merci à tous de votre participation ! - Merci à tous ! - A bientôt ! - A bientôt !
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